
Et si on réhabilitait REVERDIE?
Voyant l’autre jour que les feuilles des arbres commençaient à s’ouvrir, je cherchais un terme français qui désigne ce moment de l’année – que j’adore – où les arbres verdissent. Notre langue semble bien dépourvue dans le domaine.
J’ai découvert d’un côté « débourrement » ou « débourrage » (à ne pas confondre avec le débourrage des chevaux), terme botanique qui désigne le moment où les bourgeons des feuilles et des fleurs s’ouvrent. Ce terme n’est pas spécifique aux feuilles des arbres. Qui plus est, je n’aime pas ses sonorités bourrues, qui font penser à bourrer, boue. Suis-je le seul à associer quelque chose de négatif aux sonorités -ou, -r ? Je ne pense pas.
Ces sonorités lourdes me semblent mal adaptées à désigner le moment fugace, délicat, joyeux, où la verdure revient aux arbres. J’aime ce moment et je ne voulais pas me contenter de ce terme disgracieux. J’ai donc continué mes recherches.
Et je suis tombé sur REVERDIE. Ce terme français médiéval désigne bien le retour de la verdure : c’est un participe substantivé formé sur le radical de couleur verd- précédé du préfixe itératif re-, qui exprime le coté cyclique de la renaissance de la nature. On peut expliquer le féminin par le fait que les événements climatiques sont souvent au féminin : pluie, grêle, chaleur, etc. Il pourrait aussi s’agir d’une ellipse : la [nature/terre] reverdie.
J’aime beaucoup ce terme. Il porte plusieurs sens, dont le retour cyclique, la couleur verte. Ses voyelles d’avant -é/-i ont des sonorités claires (est-ce si subjectif ?), que j’associe volontiers à l’allégresse du Printemps. Son féminin lui donne un je ne sais quoi de clair et joyeux. S’y ajoutent de belles connotations poétiques et musicales.
En effet, si en français médiéval REVERDIE signifie initialement le retour de la verdure, il en est venu à désigner un genre poétique, souvent chanté, pratiqué par les Trouvères. La « reverdie » est un style de poème qui célèbre le retour du Printemps, associé par métaphore à la joie et à la force du sentiment amoureux. On trouve des « reverdies » en langue d’Oïl et en langue d’Oc.
Alors, d’accord pour réhabiliter REVERDIE dans l’usage commun ?
Histoire de mots #27

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