
Je vais enfin vous expliquer pourquoi (certains d’entre vous) dormez mal en bivouac. D’où peut venir ce mot à l’étrange terminaison -ouac ?
BIVOUAC est un emprunt à l’allemand alémanique (dialectes germaniques parlés en Suisse et dans le sud-ouest de l’Allemagne) bîwacht, qui signifie « garde de nuit ». Il correspond à l’allemand standard Beiwacht (prononcer « baïvarte »), synonyme désuet de bivouac.
BIVOUAC est composé du préfixe BÎ- (allemand bei-) « auprès de » et de WACHT « garde ». En allemand, WACHT/WACHE renvoie aux notions de surveillance : bewachen « garder », et d’éveil, de vigilance : aufgewacht « réveillé ».
Etymologiquement, en remontant au germanique commun, le radical WACH- est de même origine que l’anglais to watch « garder, regarder », to wake up « réveiller », awake « réveillé », woke «éveillé ». En français, guetter, être aux aguets, faire le guêt se rattachent aussi à cette racine, à travers de vieux emprunts à la langue des Francs.
BIVOUAC apparaît en français pour la première fois en 1650 sous la forme BIVOIE, au sens de garde faite la nuit en plein air pour assurer la sécurité du campement. Pour comprendre cet emprunt, il faut se souvenir que dans les armées françaises, il y avait un grand nombre de mercenaires suisses (il y en a encore au Vatican), qui parlaient des dialectes alémaniques – proches de l’alsacien.
Selon certains dictionnaires, le mot serait plutôt issu du néerlandais BIJWAKT – de mêmes sens et origine. Il s’expliquerait aussi par la présence de nombreux soldats flamands dans les armées françaises.
Dans le vocabulaire militaire, BIVOUAC a ensuite évolué dans le sens de « campement militaire en plein air ». Et les armées napoléoniennes l’ont popularisé dans toute l’Europe, si bien qu’on utilise ce terme en italien, anglais, espagnol, russe, etc.
BIVOUAC est ensuite passé au XIXème siècle dans le vocabulaire de l’alpinisme, pour désigner un campement léger en montagne. Avant que Décathlon s’en saisisse.
Le bivouac, c’est donc d’abord un état de vigilance et d’éveil, non un état de sommeil profond. J’espère que cela aidera certains à comprendre leurs mauvaises nuits en montagne ![]()
Pour ma part, j’ai plutôt le souvenir d’excellentes et d’heureuses nuits !
Histoire de mots #39

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