Black, blanc, bleu… Avez-vous noté que ces adjectifs de couleurs commencent tous par [bl-] ? Et ce n’est pas par hasard. Car ces mots partagent… la même étymologie !
C’est un peu la confusion des couleurs… Pour y voir moins flou, faisons un peu d’étymologie « profonde ». Partons de la racine reconstituée *bhel-, qui devait signifier quelque chose comme « éclatant, brillant » en proto-indo-européen, la langue-mère du latin (et donc du français, de l’italien, etc.), du grec, du sanskrit, de l’anglais, etc.

Cette racine *bhel- a eu de nombreux dérivés et descendants – et elle a été particulièrement productive en germanique. Elle a donné:
- *bhleuos, qui signifiait sans doute « clair, vif, jaune, gris-bleu », et d’où vient *blewaz « bleu » en germanique ancien. Le passage de « jaune » à « bleu » s’explique sans doute parce que le bleu était également perçu comme une couleur claire et vive.
- De là vient l’allemand BLAU, et le français BLEU, emprunté au francique (langue germanique), car le latin n’avait pas de mot pour désigner cette couleur. Merci aux Germains d’avoir inventé le bleu !
- *Bhleuos a aussi donné le latin FLAVUS (« blond »), à l’origine du mot…. français FLOU.
- *bhleg, dérivé de *bhel- qui signifiait sans doute « brûler, briller » en proto-indo-européen. En germanique, *bhleg donne *blankaz (« brillant comme le feu, éclatant > blanc »). D’où viennent:
- l’anglais BLANK (« vide, lacunaire »), et l’allemand BLANK (« brillant, étincelant »)
- le français (et les autres langues romanes) BLANC, qui a remplacé les mots latins ALBUS ou CANDIDUS (« blanc »).
- *bhleg– n’avait pas que le sens de « briller », mais aussi de « brûler ». C’est ce second sens qui a mené à celui de « noir » : *blakkaz « brûlé, carbonisé » en germanique ancien, qui donne BLACK « noir » en anglais.
En proto-indo-européen, nos couleurs comme le bleu, noir, vert, etc. ne devaient pas exister comme des catégories distinctes. Ce sont plutôt des distinctions comme brillant/éclatant vs terne/sombre qui semblent avoir été opérantes.
Les langues européennes découpent les couleurs globalement pareil, reflet de leur culture partagée. Mais si on élargit le regard aux langues du monde, on observe une diversité fascinante dans la manière dont les langues segmentent le spectre des couleurs.
Et dans vos langues, comment on dit les couleurs ?

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